Face à la flambée des prix de l’immobilier et la crise du logement qui en découle, l’encadrement des loyers apparaît comme une solution de plus en plus plébiscitée. Cet outil de régulation, déjà mis en place dans certaines villes, soulève cependant des questions quant à son efficacité et ses effets sur le marché locatif. Décryptage.
Qu’est-ce que l’encadrement des loyers ?
L’encadrement des loyers est une mesure visant à limiter les augmentations de loyer lors de la relocation ou du renouvellement du bail d’un logement. Ce dispositif a pour objectif de garantir un meilleur équilibre entre l’offre et la demande de logements locatifs, en évitant les hausses excessives qui rendent difficile l’accès au logement pour bon nombre de ménages.
Le principe est simple : un plafond est fixé pour chaque type de logement (en fonction de sa superficie, de son nombre de pièces, etc.), et les propriétaires ne peuvent pas exiger un loyer supérieur à ce plafond. Ce dernier est généralement déterminé sur la base d’un indice représentatif du marché locatif local.
Où a-t-il été instauré ?
L’encadrement des loyers a été mis en place dans plusieurs pays européens, comme l’Allemagne ou la France. En France, il a été instauré en 2015 à Paris et en 2016 à Lille, avant d’être annulé par les tribunaux administratifs en raison de vices de forme. Toutefois, il a été réintroduit dans ces deux villes en 2019, suite à la promulgation de la loi ELAN (Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique), qui autorise les collectivités locales à mettre en place ce dispositif.
Par ailleurs, d’autres villes françaises envisagent d’adopter cette mesure, comme Bordeaux, Grenoble ou Lyon. À l’échelle européenne, Berlin a également mis en place un encadrement des loyers en 2020 pour lutter contre la hausse des prix dans la capitale allemande.
Quels sont les effets sur le marché locatif ?
L’encadrement des loyers présente plusieurs avantages pour les locataires. Tout d’abord, il permet de limiter les hausses de loyer, ce qui favorise une meilleure stabilité financière pour les ménages concernés. De plus, il contribue à réduire les inégalités entre les différentes zones géographiques et entre les nouveaux entrants et les locataires déjà installés.
Cependant, ce dispositif peut avoir des effets pervers sur le marché immobilier. Certains propriétaires peuvent être tentés de contourner la règle en augmentant le loyer lors de travaux réalisés dans le logement ou en modifiant certains éléments du bail (charges, conditions de résiliation, etc.). De plus, l’encadrement des loyers peut décourager les investisseurs et freiner la construction de nouveaux logements, ce qui pourrait aggraver la pénurie d’offre locative dans certaines villes.
Des résultats mitigés
Les exemples de Paris et Lille montrent que l’encadrement des loyers peut avoir des effets positifs sur le marché immobilier. Selon une étude du Commissariat général au développement durable (CGDD) publiée en 2019, le dispositif a permis de réduire les loyers de 3,1% à Paris et de 3% à Lille entre 2015 et 2017.
Toutefois, ces résultats sont à nuancer. D’une part, l’étude souligne que l’encadrement des loyers n’a pas permis de réguler les prix dans toutes les zones concernées : certaines ont même connu des hausses significatives malgré le dispositif. D’autre part, la mise en œuvre de l’encadrement des loyers se heurte à d’importantes difficultés pratiques, notamment en termes de contrôle et de sanction des propriétaires récalcitrants.
Quelles perspectives pour l’encadrement des loyers ?
S’il est encore trop tôt pour tirer un bilan définitif de l’encadrement des loyers en France et en Europe, plusieurs pistes d’amélioration peuvent être envisagées. Parmi elles figurent notamment un renforcement du contrôle du respect des plafonds de loyer, une harmonisation des dispositifs entre les différentes villes concernées ou encore un accompagnement renforcé des propriétaires et des locataires dans la mise en œuvre de cette mesure.
En somme, l’encadrement des loyers constitue un outil intéressant pour réguler le marché immobilier et favoriser l’accès au logement, à condition d’être adapté aux spécificités locales et d’être associé à d’autres mesures complémentaires (aides au logement, incitations à la construction, etc.).